La Commission européenne dévoile son plan pour un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE à partir de 2026

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Bruxelles, 14/07/2021 (Agence Europe) –

Dans sa course vers la neutralité climatique d’ici 2050 et au milieu d’un paquet de 13 mesures, la Commission européenne a présenté, mercredi 14 juillet, son plan pour un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF).
« Ce mécanisme sera introduit d’une manière prudente et progressive et il sera totalement compatible avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Nous prendrons en compte le prix du carbone payé dans les pays tiers et l’efficacité des émissions produites par les producteurs, afin que le mécanisme soit équilibré et non discriminatoire », a déclaré le commissaire européen au Commerce, Valdis Dombrovskis.
Comme nous l’avions écrit (EUROPE B12733A9, B12756A16), la Commission prévoit un mécanisme calqué sur le système d’échange de quotas d’émission (ETS) s’adressant aux importateurs de l’UE. Les importations d’électricité, de fer et d’acier, d’aluminium et d’engrais sont pour l’instant sujettes au mécanisme dans la mesure où elles représentent 55% des émissions à risque pour les fuites de carbone, selon la Commission. Celle-ci se réserve la possibilité d’étendre le système à d’autres secteurs, sans toutefois préciser de calendrier.

Les entreprises concernées devront restituer des certificats d’émission (ou certificats MACF) en fonction de l’intensité carbone des produits importés. Le prix des certificats s’alignera sur celui des quotas ETS. Afin de rendre ce suivi possible, les entreprises devront déclarer leurs importations auprès d’une autorité nationale compétente.

La Commission n’imagine pas une mise en œuvre complète du mécanisme avant 2026. Du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2025, les importateurs devront déclarer les émissions contenues dans leurs produits ainsi que le prix du carbone déjà payé ou non à l’étranger. Ils ne devront toutefois pas restituer de certificats d’émission pendant ces trois années de transition.

Quotas gratuits et MACF

Afin d’éviter une double protection des entreprises européennes face aux fuites de carbone, la Commission confirme qu’elle prévoit de réduire le nombre de certificats d’émission à restituer pour les importateurs dont les secteurs bénéficient de quotas gratuits sur le marché intérieur dans le cadre de l’ETS.

Ces quotas gratuits devraient toutefois être progressivement supprimés. « Les quotas gratuits seront réduits de 10% chaque année, sur une période de 10 ans », a expliqué une source européenne à EUROPE.

Accueil de la proposition

La plupart des réactions autour de la proposition se concentrent sur cette fin progressive des quotas gratuits avec l’entrée en vigueur du MACF.

Cette réduction « risque de déstabiliser fortement les investissements pour les secteurs concernés », a mis en garde le président de BusinessEurope, Pierre Gattaz, représentant les fédérations d’entreprises européennes.

Même son de cloche du côté de l’eurodéputée Agnès Evren (PPE, française). « Ce mécanisme ne doit pas mettre à mal la compétitivité de nos entreprises en mettant automatiquement fin aux quotas gratuits. […] nous devons obtenir la garantie que les instruments nécessaires à notre compétitivité industrielle ne soient supprimés que si ce mécanisme fait la preuve d’être une alternative fiable et viable », a-t-elle indiqué.

Pour d’autres, en revanche, la fin des quotas gratuits devrait être bien plus rapide que ce que prévoit la Commission. L’eurodéputé Pascal Canfin (Renew Europe, français) considère que la période de 10 ans à partir de 2026 pour la suppression définitive des quotas gratuits est trop longue. « Je pense qu’on doit pouvoir trouver une majorité au Parlement européen pour aller plus vite. Je trouve normal de commencer par une phase de montée en puissance progressive, y compris une phase pilote dès 2023. Néanmoins je suis favorable à ce qu’on aille plus vite qu’une décennie pour que le dispositif tourne à plein », a-t-il expliqué à EUROPE.

Plusieurs ONG partagent cet avis, comme CAN Europe, ou la fondation Bellona.

« 10 ans de transition pour la sortie des quotas gratuits, ça signifie 14 ans par rapport à aujourd’hui. C’est bien trop long », a confié Suzana Carp de la fondation Bellona à EUROPE. Pour elle, cette période pourrait prendre fin en 2030, plutôt qu’en 2036.

Complexité administrative

À l’annonce de ce tout nouveau mécanisme, les PME européennes s’inquiètent également de la lourdeur administrative du système. « Le calcul complexe pour la déclaration des émissions sur les produits importés risque de faire payer un prix carbone plus élevé aux petits importateurs. La Commission européenne doit ainsi assurer que les procédures et conditions sur cela soient simples et gratuites », a déclaré Véronique Willems, secrétaire générale de SME United, représentant les PME européennes.

Voir la proposition de règlement de la Commission : https://bit.ly/3kgPTHS (Léa Marchal)